jeudi 19 septembre 2013

Un cœur pour deux

Dans une chambre d’hôpital, une femme d’une quarantaine d’années regarde par la fenêtre. Elle a le regard triste et la mine soucieuse…
- Maman ?
- Oui mon chéri ? Dit-elle en se tournant vers son fils de vingt ans, allongé dans son lit blanc.
- Tu crois au destin ? Dit le jeune homme brun.
- Que veux-tu dire Vona ? Dit-elle en s’asseyant sur le lit.
- Et bien, est-ce tout est déjà écrit, que les dés son déjà pipés au moment où on les lances ?
- Si c’est comme ça que tu le vois, alors non, je ne crois pas au destin. Le futur est une page blanche à écrire, répondit sa mère avec un léger tremblement de voix.
- Encore faut-il qu’on nous les donne ces pages blanches à écrire, murmura-t-il dans sa barbe sans que sa mère entende. Et si tu ne crois pas au destin, reprit-il à voix haute, comment juges-tu ce qui m’arrive à papa et à moi ?
- Comme une injustice de la vie, dit la mère en se tournant vers la pluie battante qui venait cogner le carreau. Elle agit comme un tyran qui n’en fait qu’a sa tête. Elle offre, elle reprend ; elle juge sans procès, condamne selon ses propres lois. Elle est ce fou qui tire au hasard dans la foule, continua-t-elle en battant ses mots avec la pointe de sa langue rageuse.
- Ne lui en veut pas trop Maman, dit le jeune homme doucement. Elle a besoin de la mort pour continuer à vivre. C’est sa nourriture, son pain quotidien.
- Pourquoi dit tu ça ?
- Crois-tu que pour respirer nous n’avons pas besoin de la mort ?
- Ne dis pas de sottises, Vona…
- Que fais-tu des animaux que l’on mange, des arbres que l’on coupe ? La mort est partout dans nos assiettes, dans nos cheminées. Si mon cœur fragile, venait à lâcher, ma mort ne serait que le commencement d’un autre type de vie qui n’est pas moins importante : la vie est un cycle indivisible : l’asticot mange l’homme, l’oiseau mange l’asticot, le chat mange l’oiseau ; le chat meurt et son corps nourrit la terre ; l’herbe, tout juste éclot, est dévorée par le bœuf… Et je te laisse deviner qui mange le bœuf…
- Oui, j’ai compris… Dit la mère en respirant profondément.
- C’est la règle du jeu Maman.
- On croirait entendre ton père… C’est ce qu’il ne cessait de répéter hier soir : C’est la règle du jeu, c’est la règle du jeu…
- Oui c’est la règle du jeu : la mort tisse l’existence des vivants, la fin de l’un, sonne le début de l’autre et on ne peut rien y faire. On peut tout juste espérer que notre encre rempliera les pages d’un bel et volumineux livre, dit le jeune homme avec un léger sourire.
La jeune femme ferma les yeux, gravant sur sa rétine la beauté du visage de son fils, une beauté fragile tenu par un cœur malade.
- Vona… j’entends ce que tu me dis mais, n’oublie pas ce que ton prénom signifie, dit-elle doucement en caressant les longs cheveux ébènes de son fils.
- Oui, espoir… en islandais.
- Vie ou mort, règle du jeu ou non, tu es pour nous un espoir qui un jour, s’est mit à rêver…
- Rassures-toi maman, mes mots n’empêchent pas que milles feux continuent de danser dans mes veines…Vona eut à peine finit sa phrase qu’un médecin rentra en trombe dans la chambre.
- Nous avons un cœur ! Dit-il avec un grand sourire et une voix haletante.
Vona et sa mère revêtirent des masques de statues pendant un instant puis se prirent dans les bras.
- Nous allons l’opérer immédiatement Lucie, dit le médecin à la mère tout vérifiant avec attention les derniers relevés du jeune homme.
- Bien bien, souffla la mère de Vona en lâchant son fils après un dernier baiser. Lucie tourna sur elle-même, le regard perdu puis se reprit en se secouant la tête. Je vais appeler mon mari dit-elle en se précipitant vers son sac à main…
Pendant ce temps-là deux infirmiers vinrent chercher le jeune homme. Une poignée de secondes plus tard, Vona disparaissait dans les couloirs blafards de l’hôpital. N’ayant pu joindre son mari, Lucie se précipita à la suite des infirmiers. Elle suivit le cortège médical dans le labyrinthe des ascenseurs, des étages, des différents services ; elle ne regarda pas les innombrables pancartes qui s’affichaient un peu partout sur les murs mais espéraient qu’au bout des flèches se trouvent inscrit l’aube d’une nouvelle vie pour son fils. Lucie vit disparaître son fils dans une salle ou on lui indiqua de rester à l’extérieur. Quelques minutes plus tard, le médecin vint à sa rencontre tout enfilant ses gants de chirurgiens.
- Lucie, le donneur est parfait : même groupe sanguin, non fumeur etc… Il s’est tiré une balle dans la tête et avait accroché sa carte de donneur sur sa chemise. Le médecin n’eut pas le temps d’aligner le moindre mot supplémentaire, qu’un infirmer vint lui remettre un dossier. Il l’ouvrit et son regard sourcilla.
- Vous vous trompez de dossier jeune homme, dit-il à l’infirmier qui s’en allait déjà. Vous m’avez remis celui du père, poursuivi le médecin en tendant le dossier au soignant qui le regarda d’un air interrogateur. Oui, reprit le médecin, nous allons opérer Vona Frida et vous m’avez donné le dossier de M. Louis Frida, son père ; Ne vous en faites pas, c’est une erreur bien pardonnable, continua le médecin d’un ton conciliant. Son père est soigné chez nous pour des séances de chimiothérapie. Le jeune infirmier fronça les sourcils et fixa tour à tour, Lucie Frida et le médecin.
- Je viens de vous remettre, non pas le dossier du patient, mais celui du donneur, dit-il sans trop comprendre.
Le médecin blêmit et Lucie s’écroula.

Vona fut opéré avec succès et Lucie rentra dans la maison vide trois jours plus tard. En s’allongeant en pleurs sur le lit conjugal, elle découvrit une lettre de son mari sous l’oreiller :


La vie avait dicté son jeu et mon cœur lui a répondu en changeant de je.

A-t-on le droit de tuer un braqueur ?



A moins que vous soyez un ermite sourd et aveugle, vous avez forcément entendu parler du braquage de la bijouterie de Nice du 13 septembre dernier. Mais vu qu'il n'y a que les ermites sourds et aveugles qui suivent mon blog, voici les faits :  

Peu avant neuf-heures, tout juste avant l'ouverture, des braqueurs attaquent une bijouterie et son gérant. Ce dernier est violemment frappé (à coup de crosse de pistolet semble t-il) et forcé d'ouvrir sa caisse et ses vitrines. Quelques minutes plus tard, les poches pleines d'or, les voleurs repartent à dos de scooter. Ce qui ressemblait jusque là à un braquage ordinaire va se transformer en fait divers de l'année quand le bijoutier tout juste braqué s'empare d'un fusil et se lance à la poursuite des fuyards. Il ouvre le feu à plusieurs reprises et tue l'un de ses agresseurs.

L'un des faits divers de l'année...

Depuis ce mercredi 13 septembre, l'affaire suscite un gros bordel généralisé dans les médias, la classe politique et les réseaux sociaux. Ce qui provoque toute cette polémique, c'est le caractère ambigu de l'assassinat. Dans un cas traditionnel de meurtre, un "méchant" tue "un gentil". Tout le monde est à sa place : la victime dans le tombeau et l'assassin derrière les barreaux. Dans le cas du braquage de Nice, les rôles ne sont pas si clairs... On a un braqueur (ici dans le rôle du méchant) qui agresse et vole un bijoutier (dans le rôle de la victime). Mais voilà que quelques minutes plus tard, la situation s'inverse :  on a le bijoutier  (ici dans le rôle de l'agresseur) qui tue le braqueur (maintenant dans le rôle de la victime). C'est ce chassé-croisé des rôles qui fait jaser l’opinion. Il est d'ailleurs très problématique pour la justice : en effet, dans le droit, on ne peut tuer une personne que si cette personne menace directement notre vie ou celle d'un tiers. Cela s’appelle la légitime défense.

Légitime défense ?

Dans l'affaire qui nous intéresse, la justice a décidé d'ouvrir une information judiciaire à l'encontre du bijoutier pour "Homicide volontaire". Elle ne retient pas la légitime défense. Et pour cause : Le bijoutier a tué dans un moment où sa vie n'était plus directement menacée. Pis encore, le jeune homme a été tué d'une balle dans le dos, ce qui vient prouver qu'au moment de sa mort il n'était plus une menace. Ceci dit, personne ne pourra prétendre que le bijoutier, victime du casse quelques secondes plus tôt, était dans un état normal au moment de ses coups de feu. 

La récupération politique


Quand il y a de la charogne, les vautours ne sont jamais loin... Les politiques non plus ! Ces derniers n'ont pas hésité à se servir de ce drame pour faire parler d'eux et gagner quelques points dans les sondages ! (Tous partis confondus !) Pour l'opposition, c'est bien sûr la faute du gouvernement qui est laxiste. Et pour le gouvernement, l'opposition est irresponsable et s'applique à monter les uns contre les autres. Bref, les politique nous ont une nouvelle fois offert un spectacle pathétique. Le maire de Nice a même déclaré sur une chaîne bien connue que le gouvernement était du côté des malfrats et des délinquants ! (Comment le cadre d'un parti démocratique peut-il dire ça ?) Au-delà de l'imposture intellectuelle et démagogique, ce fait divers a clairement montré les différences idéologiques entre la gauche et la droite.  

Deux camps s'opposent
  
Depuis cette histoire, la France est coupée en deux. Ceux qui disent que le bijoutier de Nice ne doit pas être poursuivi et ceux qui disent le contraire. Pour les premiers, le braqueur "n'a que ce qu'il mérite". C'est lui qui la cherché. Voici leurs principaux arguments : 
- Le braqueur est à l'origine de sa propre mort : s'il n'avait pas braqué, il ne serait pas mort. (Monsieur, c'est lui qui a commencé !)
- Tout homme a le droit de se défendre et doit pouvoir le faire avant d'être mort : le fait que le bijoutier ait prit des coups et qu'on ait menacé sa vie (quelques minutes avant son tir) vaudrait pour une sorte de légitime défense indirecte. 
-  La justice doit protéger les honnêtes gens et pas les délinquants. (Dans l'histoire, le bijoutier avait un casier vierge, et l'autre 14 condamnations). 

Pour ceux de l'autre de camps, les arguments sont assez simples :
- La loi doit s'imposer étant donné que l'on est pas dans un cas de légitime défense. 
- Pourquoi ne pas les avoir laissé partir quand les braqueurs se sont enfuis ?
- Quelques bijoux, quelques coups et quelques menaces valaient-ils la vie d'un homme ? 

Que penser dans tout ça ?  
    
Ce qui est sûr, c'est que cette histoire a fait couler beaucoup d'encre. On a entendu tout et n'importe quoi. Mais surtout n'importe quoi d'ailleurs, dont la palme d'or revient à ceux (les bourdes des politiques étant hors concours...) qui ont monté un collectif sur facebook pour soutenir le bijoutier (qui malgré les circonstances, a quand même tué un homme !) et tout ceux qui en ont profité, comme à chaque fois, pour déverser toute leur haine de l'humanité : "C'est bien fait pour le braqueur !" "On n'est plus en sécurité" "On n'est plus chez nous, on doit se défendre..." "C'est le délinquant qui est mort donc..." "C'est celui qui travaille tous les jours d'arrache-pied, qui en plus se fait agresser, qui se défend, que la justice va condamner ? C'est une honte !" "Le gentil s'est défendu et c'est le méchant qui est mort ! What esle ?" etc. Le problème c'est que dans cette histoire, le gentil, l'honnête travailleur, l'agressé... a tué ! Les conséquences de cette rhétorique de soutien en faveur du bijoutier risque d'aboutir à la minimisation de l'acte en lui-même : tirer sur un autre homme de dos, mais aussi "tuer" dans son sens le plus général. La justice ne peut pas se permettre de ne pas condamner un tel acte. Dans le cas contraire, c'est une incitation massive à l'auto-défense armée, et, bien entendu (les américains en savent quelque chose...), à une escalade meurtrière entre braqueurs et braqués.  Si les uns savent qu'ils ne seront pas condamnés en dehors de la légitime défense, c'est une porte ouverte à la vengeance et à ses cercles vicieux. A contrario, si les braqueurs savent que les commerçants s'arment et sont prompt à tirer sans être inquiétés par la justice, ils seront d'autant plus violent et useront de leur arme au moindre geste qui leur semblera suspect. Si certains croient que les braqueurs feront moins de casses en sachant les commerçants armés, ils se trompent ! Allons, un peu de sérieux : on ne devient pas braqueur de bijoux par vocation ! On ne risque pas sa vie par plaisir mais bien souvent, par nécessité. A l'inverse, braquer un bijoutier ne doit pas être minimisé (les peines sont d'ailleurs assez lourdes dans ce domaine...) et il ne faudrait pas oublier que les bijoutiers font un métier particulièrement dangereux qu'il faudrait d'avantage sécuriser.

Nous sommes dans un état de droit. Le "Œil pour œil" et "le dent pour dent" est un adage moyenâgeux et la société française ne doit pas oublier ses principes humanistes. Elle ne doit pas tomber dans la psychose généralisée dans laquelle nous plongent les médias pour un simple fait divers dramatique. A tout ceux qui ont peur de se faire agresser, bien sûr ça arrive. N'oubliez pas pour autant que c'est extrêmement rare au vu du nombre total de la population. (Vous avez bien plus de chance d'avoir des dégâts physiques suite à un accident de voiture que des suites d'une rencontre avec un malfrat !)

L'escargot. 

mercredi 18 septembre 2013

Réflexions sur la main - partie 3 (fin)




Dans de nombreuses cultures et de manière générale « La main exprime les idées d’activité, en même temps que de puissance. » 11 Elle est un emblème royal, un « instrument de la maîtrise et un signe de domination. » 12 Avoir la « main mise sur » ou « Avoir son destin entre ses mains » exprime l’idée d’une maîtrise, le pouvoir de quelqu’un sur quelque chose. « Iad » en hébreux « signifie à la fois main et puissance. » 13 Du point de vue de la religion chrétienne « Tomber entre les mains de Dieu ou de tel homme signifie être à sa merci ; pouvoir être créé ou anéanti par lui » 14. Comme le fait remarquer Jean Chevalier, lors de la procession de l’immixtio manuum, le vassal remet sa liberté –ou la confie– en plaçant ses mains dans celles de son suzerain. L’imposition des mains signifie souvent un transfert, un legs de pouvoir, de puissance, d’énergie ou encore de légitimité. On pense à l’accolade ou à la poignée de mains entre un nouveau président (ou chef) et son successeur, à l’échange des clefs, du sceptre, de la bague ou de façon plus moderne, à la transmission des codes de mise à feu des armes nucléaires. Dans ce genre de cérémonies, la main est le lieu de l’échange, qui vise pour la plupart du temps la maîtrise du pouvoir ou sa passation. A contrario, le fils d’Abraham, Ismaël « fut renvoyé par son père les mains vides : sans biens et sans droits. » 15 Dans le contexte du mariage, demander sa main à quelqu’un c’est lui demander d’engager tout son être dans une union. La main est ici représentative de la personne en entier. Dans la religion chrétienne encore et dans d’autres, c’est la main qui permet la communion avec les forces divines : on pense aux deux mains jointes de la prière  ou aux gestes particuliers des paumes des orants. Quand enfin, on s’adresse à Dieu directement, c’est en levant les mains vers le ciel. Dans la mythologie grecque, le nom du centaure Chiron est construit à partir du grec ancien Chiro qui désigne la main. Or Chiron, en plus d’être un habile archer est celui qui transmet le savoir à différentes divinités ou héros, tel Achille. Ceci rejoint ce qu’écrivent Jean Chevalier et Alain Gheerbrant qui citent Grégoire de Nysse (331 – 394) pour lequel la main est liée à la connaissance car à l’origine du langage et de la transmission de la pensée des anciens à travers leurs textes. Sous tous ces aspects, la main de l’homme présente un caractère exclusivement humain. C’est elle qui différencie l’homme de toutes les autres espèces, ce qui en a fait un membre particulier dans la construction de son identité. Autant dans son identité universelle qu’individuelle. 

Sources : 

11 - CHEVALIER Jean & GHEERBRANT Alain,  Dictionnaire des Symboles entrée : « Main » p.599
12 - Ibid p.599
13 - Ibid p.599
14 - Ibid p.602
15 - Ibid p.602

mardi 17 septembre 2013

Réflexions sur la main - partie 2


George De La Fuly

La main vient du latin Manus qui aurait autrefois désigné l’homme et pourrait être à l’origine de la construction du mot latin humanitas 4 (l’humanité). En Français –langue d’origine latine– le suffixe d’humain est « main ».  Il apparaît tout de suite évident, que du point de vue du nom, la main est indissociable de l’Homme. La question que l’on peut légitimement se poser est : pourquoi de telles proximités étymologiques existent entre l’Homme et sa patte ? Pourquoi cet organe –et pas un autre ?– fait-il partie intégrante de la construction de son étymologie ? 

« L’homme a fait la main, je veux dire qu’il l’a libérée d’une antique et naturelle servitude, mais la main a fait l’homme ».5 dit Henri Focillon. Il entend par là que la main est à l’origine de ce qu’il appelle le véritable basculement et « peut-être le plus grand de l’histoire de l’humanité… » 6  quand « En prenant dans sa main quelques déchets du monde, l’homme a pu inventer un autre qui est tout de lui.» 7  Autrement dit, quand l’homme a cessé de subir la nature mais qu’il a façonné ce qu’elle lui a donné, il a pu bâtir un autre monde et par là même occasion, changer le cours de son histoire. L’homme a construit son destin quand grâce à elle, il a pu fabriquer son premier outil. A cet instant précis « il a cessé d’être agi par des forces inconnues pour agir par ses forces propres. » 8 Il a su modifier la matière qui l’entourait et l’utiliser à son avantage. La main a cette capacité, de par sa construction ligamentaire complexe, de pouvoir moduler à sa guise n’importe quelle substance en objet usuel. Elle est cet organe de la création, la source du passage de la matière « inerte » à la matière « active ». Elle est l’instrument de cette transformation, de cette métamorphose. A travers sa main, l’homme communique à la matière des formes de l’esprit et en retour, l’esprit s’informe par cette main. Elle donne à des surfaces, une identité humaine. Ainsi grâce à sa main, l’homme a pu « habiter » un autre monde, celui du toucher. Ces capacités que l’homme a acquises grâce à sa main, en ont fait une espèce à part dans les chaînons cycliques de la nature. Mais que ce soit sa patte –devenue main– qui, lui faisant découvrir un nouvel univers tactile capable de créer, ait façonné son esprit, ou bien, que ce soit son esprit qui ait donné de l’intelligence à cette main, ceci ne change en rien la donne. Grâce à la main, cet « esprit-corps » ou « outil de l’esprit », l’homme s’est extrait du bloc monolithique où il était prisonnier depuis  de nombreux millénaires. Le corps et l’esprit dégagés, il a pu envisager de nouvelles perspectives, de nouvelles conceptions, de nouvelles façons d’entrevoir l’existence. 


La nouvelle conscience de ses objets auxquels l’homme a su communiquer la vie, auxquels il a du s’identifier et grâce auxquels il a su s’extraire de la nature et trouvé une identité, l’ont mené à créer quelque chose de nouveau. Il n’était plus question d’une invention fonctionnelle, matériellement tournée vers la survie mais d’une création tournée vers une dimension immatérielle, non plus existentielle, mais « existentialiste ». Cette « chose » était en fait un nouveau langage non plus strictement usuel, strictement essentiel mais extra substantiel, extra ordinaire pourrait-on dire. Ce néo langage inventé par l’homme était la tentative d’un regard, d’un ressenti posé sur un monde qui l’entourait. Consciemment ou inconsciemment, cette création, ce geste était voué à traverser les temps et à devenir « extra-organique. » Il s’établissait dans tous les sens du terme, à dépasser la « survie », à devenir un « au delà de la vie ». Cette création, c’est ce que nous, appelons l’« Art ». Ce geste, l’Art, simple en apparence, est une véritable synthèse de tous ces chemins que l’homme avait pris jusqu'à lui; de tous ceux qui parviendraient jusqu'à nous. Encore une fois, c’est l’esprit et la main qui avançant pas à pas et main dans la main, sont à l’origine de cette avancée. Au confluent de cette nouvelle dimension humaine, c’est la main qui faisait, elle, cet organe de création qu’un jour des hommes ont plaquée sur la pierre des grottes pour en laisser trace. A travers cette empreinte laissée, la main était célébrée en tant que main-outil ; en négatif sur ce mur, elle devenait pourtant autre chose. L’homme, l’espèce elle-même, devenait autre chose : La main c’était l’homme et comme la boucle que l’on ferme, l’homme avait trouvé son symbole, son porte drapeau : la main. Ce qui nous tourmente et à la fois nous conforte dans une certaine approche de cette étude, c’est de voir que des hommes ont, en des époques éloignées, en des latitudes isolées, éprouvé le désir de plaquer leurs mains contre les murs et d’en tracer ses contours. 

 « Les mains négatives, c'est-à-dire faites selon la technique du pochoir semblent faire partie du stock culturel commun à l'ensemble des communautés archaïques des mondes anciens, puisqu'on les rencontre quasiment partout. » 9


Cueva de las Manos, Río Pinturas, en Patagonie argentine, province de Santa Cruz. L'art le plus ancien d'Amérique du Sud (7 300 av. J.-C.)

Quelle attitude étrange et troublante que de vouloir laisser à la postérité, une marque si anonyme, si semblable entre toutes ? Etait-ce parce qu’elle était la première à portée de souffle, parce qu’elle était semblable à un visage ? Etait-ce la prise de conscience que cet instrument articulé au bout du poignet les avait menés vers une nouvelle vision du monde, qu’elle les avait façonnés d’une autre manière ? Ce qui est sûr c’est que la main avait une place unique à l’intérieur du corps et de l’esprit de l’homme. La main est donc susceptible, partout où elle se trouve, partout où on la voit, d’avoir une place particulière au sein d’un corps et d’une pensée. Cette connivence –cette histoire commune– entre l’Homme et la main a fait naître ce langage complexe et de lui, est né un ensemble de rapports menant de l’un à l’autre : « Un art dont elles seraient totalement bannies, resplendiraient, d’inhumanité. » 10 



Sources : 

4 - CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) : http://www.cnrtl.fr/ entrée : « manus » & « humanitas »
5 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.107
6 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.111
7 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.110
8 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.111
9 - D’après l’ethno-archéologue CHAZINE, Jean-Michel, dossier le mystère des mains de Bornéo : http://www.futura-sciences.com/fr/
10 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.118



lundi 16 septembre 2013

Réflexions sur la main - partie 1




Jean-Baptiste Huynh - Main II

Dans le dictionnaire de L'Académie française de 1762 le langage, du latin lingua (langue) est défini comme une : « Manière de parler d'une Nation », mais aussi comme « Discours, style, & manière de parler » ou encore comme « La manière de parler de quelque chose, eu égard au sens plutôt qu'aux mots ou à la diction. » et enfin «De tout ce qui sert à faire connoître la pensée sans parler.» 1 On pourrait, de manière générale, synthétiser le langage comme un ensemble de signes (gestuels, vocaux…) qui permettent à un individu de rentrer en communication avec au moins, une tierce personne. Celle-ci, peut être verbale ou non-verbale ; c'est-à-dire avec l’utilisation ou non de mots. Le langage s’établit dans un système plus ou moins structuré, indispensable à la compréhension par le sujet avec qui s’établit la communication. 

Il s’est avéré très vite au cours de mes différentes recherches que la main de l’homme est une véritable créatrice de langage. Elle est à l’origine des médiums qui existent en dehors de la voix, telle l’écriture, la peinture ou la sculpture par exemple. La communication qui passe par la main peut aussi s’effectuer de manière directe comme peut le faire la voix, que ce soit en sa compagnie ou en son absence. Comme on reconnaît le son de la voix (qu’on connaisse la langue ou non) on reconnaît le son de deux mains qui s’entrechoquent. L’applaudissement par exemple, qui vise à communiquer l’admiration est couramment utilisé depuis l’antiquité dans notre société occidentale. Son bruit est directement reconnaissable et il se module en intensité, en rythme, (en cadence de diction pourrait-on dire ?) afin de communiquer un sens variable comme une voix qui murmure ou crie afin d’exprimer la douceur ou la colère, la peur ou la joie etc. Il est d’ailleurs intéressant de voir que dans la vie de tous les jours, quand quelqu’un ne nous entend pas ou le feint, notre premier réflexe est de taper dans nos mains pour attirer son attention (ou de faire un claquement de doigts), d’agiter notre main devant ses yeux et en dernier recours, d’aller le toucher pour lui signifier notre présence. A travers cet exemple, il apparaîtrait que la main de l’homme prend le relais de la communication en l’absence ou dans l’impossibilité de la voix. On peut le vérifier par d’autres : un homme politique demande le silence avec ses mains quand les bruits de la foule couvrent sa voix ; dans les théâtres romains, comme l’empereur ne peut être entendu de par les clameurs ou de par la grandeur du stade, il utilise un langage visuel avec le spectateur ; les golden boys dans la cohue générale de la bourse de New York utilisent la gestuelle des mains pour communiquer entre eux. L’absence ou l’impossibilité de la voix, est donc la chance de la main. 

On peut même ajouter qu’en l’absence ou dans l’impossibilité de la voix, c’est la capacité visuelle de la main qui est utilisée. D’ailleurs, ceci est tout de suite perceptible quand on envisage la communication des sourds et des muets. Ils n’ont pour se comprendre, que la langue des signes qui est un ensemble de gestes mimétiques. Celle-ci s’organise de manière visuelle et/ou avec le sens du toucher. On peut étendre l’analyse à ceux qui ne parlent pas la même langue et dont le premier réflexe est de recourir à la main, à une sorte de langage des signes improvisé. Si on veut encore aller un peu plus loin, on s’apercevra que ceux qui ne peuvent pas « s’entendre » sur un sujet utiliseront la gestuelle des mains de façon prépondérante. 

La main nous renvoie aussi aux sources de l’homme où avant, la parole (ou tout autre langage verbal) s’effectuait probablement par la main et des bruits vocaux. La main de l’homme est aussi restée pendant longtemps, l’unique moyen, l’unique instrument, l’unique outil de communication entre deux époques différentes; Autrement dit, le membre qu’est la main, est cet intermédiaire qui permet de relier deux personnes ne vivant pas au même siècle. Deux personnes qui par définition ne peuvent pas s’entendre ni même entrer en communication de manière visuelle ou haptique. La main de l’homme permet le legs, la transmission de la connaissance, du monde, de sa propre culture et même d’un soi. On en revient –pour ne citer qu’elles– à l’écriture, à la peinture, à la sculpture et même à la musique, qui dans des temps ultérieurs avaient besoin de cet instrument qu’est la main pour atteindre la postérité d’autres époques. Dans cette manière qu’elle a de berner les temps, d’offrir au(x) présent(s) une voix du ou des passé(s), intermédiaire des temps, elle devient intermédiaire de l’esprit de l’homme ; elle n’organise plus le langage de manière directe et la présence de l’esprit au détriment de l’instinct, la fait devenir main-outil, voix-relais, voix-visuelle d’un esprit désormais muet. (Avant la naissance de l’enregistrement, même la musique se transmettait par des signes visuels faits par la main…) Malgré qu’elle ait toujours besoin du cerveau pour s’exprimer, elle n’est jamais la simple exécutante de l’esprit quand celui-ci s’exprime à travers elle :

 « La main n’est pas la serve docile de l’esprit, elle cherche, elle s’ingénie pour lui, elle chemine à travers toutes sortes d’aventures, elle tente sa chance. »2 

La main de l’homme est une créatrice de langage qui vise à faire interagir au moins deux sujets (ou le sujet avec lui-même) et qui utilise au moins trois sens (le toucher, la vue et l’ouïe) là où la voix n’en utilise qu’un (l’ouïe) là où le regard ou la vue, n’utilise que la vue. Cette faculté polyvalente, adaptable et modulable (qui la définit en soi) permet à la main d’être à la source d’un langage que Marcel Brion appelle « la langue universelle » 3 de l’homme. Nous ne disons pas que tout ce que peut faire la main de l’homme porte un sens identique dans les cultures existantes et ayant existé ; nous disons simplement qu’elle est un instrument qui –comme la voix– permet, de façon universelle, de produire du langage humain. Contrairement à la voix, elle est un membre emprunt d’humanité. De par ses fonctions, de par son outillage et de par sa complicité avec l’esprit, elle est un membre unique dans l’histoire du cheminement humain. 



Sources : 

1 - CNRTL (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales) Dictionnaire de l'Académie française, 4th Edition (1762) http://www.cnrtl.fr/ entrée : « Langage » 
2 - FOCILLON, Henri, Vie des formes suivi de l’éloge de la main, p.124
3 - BRION Michel, les mains dans la peinture, p.120

lundi 9 septembre 2013

La trahison des images


Tout le monde connait, même le plus inculte d'entre nous, le célèbre tableau ci-dessus peint par Magritte en 1929. Du moins, tout le monde connait la célèbre expression : "Ceci n'est pas..." que le tableau du peintre belge a fait entrer dans le langage courant. En effet, chacun d'entre vous a déjà entendu au moins une fois dans sa vie un petit rigolo lui dire : "Ceci n'est pas un objet" et ce, en vous montrant l'objet susnommé. Cette petite mode du "Ceci n'est pas..." a même fleuri sur les vitres de certaines voitures !


    

Même les apprentis peintres s'y sont mis et Google regorge d'images comme celles ci-dessous : (Tous les parfums existent ! Il y en a vraiment pour tous les goûts !)

    

 Mais ça ne s’arrête pas là, la phrase peinte par Magritte a investi à peu près tous les domaines possibles et imaginables !

La politique :


















La musique, le cinéma :




















Les objets marchands, le marketing :
                  

Bref, vous l'aurez compris, le monde entier s'est approprié et s’approprie encore l'idée du grand peintre.

Mais est-ce que tout le monde comprend vraiment ce que voulait dire Magritte ? Quelle était l'idée primaire de ce tableau ? 

Comme beaucoup, j'ai remarqué au cours de ma vie que l'habitude, la routine, vide les choses de leur substance. Le meilleur des exemples est bien sur l'amour entre deux personnes qui se refroidit au contact de l'habitude, se vide de sens et finit par disparaître. Dans le langage et les expressions courantes, c'est la même chose. A force d'être prononcées par habitude et nonchalance, leur but premier est oublié. Qui sait aujourd'hui d'où vient l'expression "A la queu leu leu", être "Soupe-au-lait", ou encore, "Un miroir aux alouettes" ? (Réponses en fin d'article !) Cela ne vous arrive-t-il pas d'ailleurs de comprendre tout à coup des expressions que vous répétez depuis dix-ans ? (A ce propos, j'ai mis beaucoup d'année à m’apercevoir que passer du coq-à-l'âne faisait référence aux deux animaux de différentes tailles pour expliquer l'écart subit entre deux sujets. Avant de le comprendre, mon esprit l'écrivait passer du cokalane.) Ainsi, toutes ces expressions ont un sens profond, qui ne vient pas de nulle part mais que, par habitude, nous répétons comme des perroquets sans véritablement comprendre. Egalement, nous le faisons avec les figures de style que nous employons sans même nous en rendre compte... Qui se souvient que, quand un professeur dit "J'ai une classe bruyante" il utilise une métaphore. (Et oui, en elle-même, la phrase ne veut rien dire : une classe ne peut en aucun cas faire du bruit de son propre chef...).  Bref, tout ça pour vous dire que l'habitude détruit le sens et l'origine des choses qui, vidées de leurs racines, ne sont plus que plantes sèches et coquilles vides. Littéralement, nous perdons de vue ces dites choses. Il convient donc (si vous ne voulez pas perdre votre femme ou votre français) de toujours vous interroger sur l'origine des mots, des expressions et d'entretenir le feu de votre esprit devant les évidences quotidiennes.

Pour en revenir à Magritte, je pense que la phrase de son tableau est tellement rentrée dans le langage courant que rares sont ceux qui savent encore ce qu'elle veut dire. Car oui, elle veut bien dire quelque chose dans le sens où elle essaye de transmettre une idée, une observation. Il est clair qu'en apparence, ce n'est pas si évident : il peint une pipe et écrit dessous "Ceci n'est pas une pipe". Que comprendre donc ? Qu'il se fout de nous ? Qu'il nous prend pour des demeurés ? Qu'il est tellement connu qu'il sait les gens assez idiots pour acheter sa toile ? Rien de tout ça et ceux qui croiraient que c'est juste "pour rire" ou que c'est simplement "absurde", font fausse route. Dans le domaine de l'art, chez tout artiste qui se respecte (nous y reviendrons dans un autre article) faire de l'absurde pour faire de l'absurde, ça n'existe pas. Ce que souligne Magritte dans son tableau est donc en réalité aussi simple qu'intelligent : Car oui, sa phrase est vraie : ce que nous voyons n'est pas une pipe. Il ne s'agit ni plus ni moins que de la représentation d'une pipe. La représentation d'un objet n'est pas l'objet ! Si dans le monde du langage, les images sont les pendants des mots, les couleurs les pendants des lettres, vous conviendrez que le mot "chien" n'est pas un chien autant que l'image d'une pipe, n'est pas une pipe. Et effectivement, il vous sera impossible de mettre du tabac dans la pipe de Magritte, (autant qu'il vous sera impossible d'entendre aboyer le mot chien...) de sentir son odeur, de l'attraper avec vos doigts. Et si d'aventure vous y mettiez le feu pour la fumer, c'est au musée que vous foutriez le feu et non à du tabac ! L'image de pipe que vous voyez n'est ni plus ni moins qu'un peu de pigment sur une toile. Des morceaux de couleurs mis bout à bout et qui donnent l'illusion d'une pipe.

L'oeuvre de l'artiste pourrait alors paraître sans grand intérêt. On pourrait même se dire  : tout ça pour ça ? L'intelligence de l'artiste est en réalité bien plus complexe. Dans son tableau, deux signes renvoient à la pipe, cet objet réel qui sert à fumer du tabac. Le mot "pipe" et l'image de la pipe. La différence majeure entre les deux c'est que le mot pipe ne ressemble pas l'objet qu'il désigne; l'image de la pipe, oui. Ils ne sont pourtant tous les deux (autant le mot que l'image) qu'un peu de peinture sur de la toile ! Là est pour Magritte le côté pervers de l'image réaliste qui ressemble à ce à quoi elle fait référence dans le réel. Comme une coquille vide. Comme si elle se prenait pour ce qu'elle n'était pas. Et celui qui se prend pour ce qu'il n'est pas, c'est un menteur, un mythomane ; en somme, c'est quelqu'un de faux. En écrivant sous son image de "Pipe" "Ceci n'est pas une Pipe", Magritte rappelle au spectateur l'imposture de l'image qui se voudrait réaliste. C'est ce que le peintre Belge appelle la Trahison des images et qui n'est ni plus ni moins que le titre son tableau.

La réflexion du peintre, véritable génie intellectuel de son temps, ne s'arrête pas là. Ce qu'il souhaite avant tout c'est que la peinture, en tant qu'art, s’affranchisse de son devoir de représentation du réel.  En effet, depuis de longs siècles, la peinture n'a cessé de vouloir représenter les objets du réel. Les représenter de façon toujours plus réaliste, toujours plus convaincante, avec toujours plus de détails, de mouvements, de textures, de relief... Mais au final à quoi bon ? A quoi bon représenter un arbre, une fleur, un oiseau ? A quoi bon les représenter de façon réalistes puisqu'il nous suffit d'aller dans la forêt voisine pour les voir ! Pourquoi payer l'entrée d'un musée pour aller voir la copie de ce que l'on peut apprécier gratuitement ; de ce que l'on peut en plus, toucher, sentir, goûter et voir se mouvoir ? Magritte pose donc plusieurs questions intéressantes avec son tableau : Quel est le rôle de la peinture et qu'est-ce qui nous attire dans la peinture ? Autrement posée : la peinture doit-elle être une simple copie du monde réel ? Ne peut-elle pas faire plus ? Et l'artiste peintre, n'est-il qu'un "Bon coup de crayon" ? N'est-il qu'un "photocopieur" ? La réponse de Magritte est bien sûr la suivante : la peinture ne doit pas copier ni recopier : elle doit créer. Sinon, à quoi bon. Autant poser un chevalet devant une fenêtre et appeler ça une peinture. Voici une toile de Magritte qui illustre parfaitement son propos et sa démarche intellectuelle :


Ce tableau nommé La condition Humaine et peint en 1935 appelle les esprits à réfléchir sur la peinture et à la faire sortir de sa condition traditionnelle de représentation. Pour Magritte, la peinture doit être un monde à part et un monde à part-entière. Un monde qui prend ses distances avec le monde réel et ses aspects sensibles. Elle doit dépasser le  réel. Le tordre, l'arranger, le modifier. Le peintre doit composer avec les qualités propres à la peintures (couleurs, textures, formes, cadre) et détourner les images réalistes a des fins lyriques et réflexives. Le spectateur doit rencontrer dans la peinture ce qu'il ne peut pas trouver en dehors d'elle-même et l'artiste ne doit pas se contenter d'être une main relié à un œil. La peinture doit être lieu de surprise, espace de jeu et de poésie. Elle doit nous éloigner du réel sensible que nous voyons tous les jours et ce, tout en utilisant ces mêmes éléments. Des éléments qu'il faut mélangés afin de créer différents effets susceptible de toucher le spectateur. En témoigne quelques tableaux du maître :




Magritte n'est pas un cas à part dans le champs de l'histoire de l'art. Le peintre participe à un élan intellectuel commencé à la fin du XIXe siècle qui questionne les modes de représentations de la peinture. Chacun de ces artistes, à leur manière, essaieront de faire changer d'axe l'esthétique pictural. En somme, tous essaierons de l’affranchir de sa dépendance au réel de façon originale. Picasso, Braque, Duchamp, Modigliani, Gauguin, Matisse, Pollock, Klimt, etc. participeront également à cet élan qui aboutira petit à petit à la peinture abstraite.  

Une brève conclusion pour cet article : la nécessité de s'interroger devant ce qui nous parait évident et habituel. Les œuvres, les expressions... ne sont pas là par hasard. Elles découlent pour la plupart de réflexions longues et profondes qui font avancer la compréhension de l'homme sur l'homme et la vision de l'homme sur son environnement. Méfiez-vous des fanatiques "de l'absurde" qui utilisent le mot à tord et à travers pour remplir les vides de leur savoir. Dire "C'est absurde" est le réflexe de toute personne qui ne comprends pas. Les grands artistes, que le temps nous permet de nommer ainsi, ne sont pas des dealers de sottises. Ils font partie de l'élite intellectuelle et contrairement aux apparences (même chez les surréalistes et les peintres abstraits...) ce qu'ils créent sont souvent très lumineux pour qui sait se creuser un peu les méninges. Donc oui, même Duchamp (Celui qui a volé un urinoir et qui l'a baptisé "fontaine" en en faisant une oeuvre) était un génie. Mais ça, je vous en parlerais dans un prochain article !

L'escargot

Comme promis, les explications des différentes expressions (source : http://www.expressio.fr) :

A la queue leu leu : (se mettre les uns derrières les autres)Après le XIe siècle, en ancien français, la syntaxe était très différente de celle d'aujourd'hui. On pouvait s'y passer d'article, écrire un complément de nom sans préposition ou rejeter le verbe en fin de proposition. Ainsi le nom du village de Bourg-la-Reine n'avait rien à voir avec les frasques sexuelles du roi, comme aurait dit Coluche, mais signifiait simplement "(le) bourg (de) la reine""à la queue leu leu" était un raccourci de "à la queue (du) leu (le) leu" ou, en moins compact encore, "c'est à la queue d'un leu qu'on trouve un autre leu". Quand on sait que :
  • leu est l'ancien nom du loup,
  • que les petites bandes de loups avaient pour habitude, paraît-il, de se déplacer les uns derrière les autres, donc chaque loup derrière la queue du congénère qui le précédait,
  • et que le loup comme le renard était très présent dans l'imaginaire des gens de l'époque,
On comprend que cette expression soit apparue pour désigner une file indienne, bien avant que l'Amérique et les indiens soient découverts. 
Le miroir aux alouettes : (piège, leurre, trompeur) Cette expression vient tout simplement d'un type de piège qu'utilisaient autrefois les chasseurs pour attirer certains oiseaux, dont les alouettes. Composé de morceaux de bois garnis de miroirs, ce piège, lorsqu'il était agité, provoquait des reflets brillants qui attiraient les oiseaux que les chasseurs n'avaient plus alors qu'à capturer au filet ou à abattre au fusil.
Être soupe au lait : (être lunatique) :  Expression issue au XIXe siècle de la locution monter comme une soupe au lait.
Il suffit d'avoir expérimenté une seule fois le comportement du lait (ou de la soupe au lait) lorsqu'il se met brutalement à bouillir pour comprendre cette association avec une personne dont l'humeur change très brutalement, aussi vite que le lait redescend dès qu'on le sort du feu.

jeudi 5 septembre 2013

Blog en cours de construction !



Je débute tout juste ART MANIAC, et fais mes premiers pas dans la blogosphère. De fait, le design du blog est voué à évoluer ces prochains jours, et mes billets mettrons un peu de temps avant d'être publiés.

Je vous remercie pour votre indulgence, votre patience... et votre curiosité !

Et en attendant, vous pouvez jeter un coup d’œil au manifeste ! 


L'Escargot